Si nous allons tous inéluctablement vers la fin, autant se prendre par la main, faire la ronde tous ensemble et tromper le chemin.
J’aurais pu pleurer ma colère, mοn dégoût, mon incompréhension, mon incapacité, mon ignorance et ma déception.
Mais je préfère dire oui aux couleurs et se faisant dire oui à la vie et la colorier des couleurs de l’amour du mystère de l’espoir et du renouveau. Rouges, verts, bleus, jaunes !
Quand je dors contre toi, l’Appia m’accueille sur un air d’ode à la joie.
Quand je sens sur ma peau tes doigts, je danse au son des rayons du soleil, cette fois!
Les herbes sentent les souvenirs d’enfance. Les bobos aux genoux. Les guirlandes de rigolade.
Les bruissements des feuilles chatouillent mon cœur et apaisent mon âme comme cette berceuse rassurante d’il y a longtemps.
Les cigales, les oiseaux et les chèvres jacassent et savourent l’instant. Ils accompagnent mes pas légers portés par cet air de bonheur.
La Via Regina, bordée de cyprès et de pins parasols ancestraux, prodigue des caresses parfumées, me câline.
Je palpe la chaleur et l’harmonie.
Ces baisers, ces parfums sensuels, ces airs de trompette triomphante,
C’est sur eux que je compte quand la brise sera venue.
Quand tu dors loin de moi
Les fugues dans l’Appia m’égratignent
Les branchages griffent et grincent
La pluie dégage de relents de marécages.
J’entends maintenant dans l’imposante avenue, les hurlements des fidèles de Spartacus
Leurs fantômes dansent avec les ombres vacillantes des cyprès malmenés par de bourrasques violentes.
Le cri pointu de la chouette me perce les yeux.
Et mon cœur déborde de détresse, de doutes, d’angoisse, de colère. Je me laisse finalement aller à hurler.
Des ombres se faufilent, les chats miaulent. Le renard et la chouette ont pris peur et se blottissent l’un contre l’autre, terrés au pied d’une ruine, les restes d’une tombe romaine.
Je m’y accroupis aussi et perçois l’odeur du matin prometteur. Anne Sibireff
A présent, de nuit comme de jour, je parcours les rues, la campagne, les cieux et je crée des visages et sans doute des vies dont je pensais ne rien connaitre.